image+nation : Mathilde Capone aborde l’enjeu du consentement à travers les regards lesbo-queer
L’idée derrière « La fabrique du consentement : regards lesbo-queer » est venue à Mathilde Capone il y a déjà plus de quatre ans. Évoluant dans des milieux féministes et queer, elle a depuis été témoin de plusieurs dénonciations d’agressions sexuelles, une mobilisation qu’elle trouve nécessaire, mais qui implique également de trouver des processus de justices transformatrices. « Je trouvais que dans les discours publics nous n’allions pas assez loin dans l’exploration de cette notion de consentement qui est intéressante, mais aussi très subtile », se souvient la réalisatrice en entrevue à propos de son long métrage documentaire présenté au Festival image+nation.

Certes, la réflexion binaire du concept (oui veut dire oui, non signifie non) mérite encore d’être à l’avant-plan aujourd’hui et l’importance de respecter le « non » demeure d’une pertinence indiscutable. Mais pour Mathilde Capone, l’idée du consentement est beaucoup plus complexe. D’où son désir d’aborder l’enjeu sous un autre angle, celui de déplacer le regard et de discuter de moyens d’éduquer à la sexualité pour prévenir les agressions sexuelles et assurer de meilleures interactions entre les limites, les envies et les désirs de tous et de toutes.
« Il y a un manque d’espace public de parole pour les personnes lesbiennes et queer qui ont développé des outils super intéressants sur le consentement et les agressions sexuelles. Dans ces communautés, il y a une avancée sur ses sujets. Il fallait aller chercher ce qu’il y a de subversif et le partager à l’extérieur », précise la réalisatrice à propos de l’origine de ce projet.
Il prend d’ailleurs une forme toute particulière. Mathilde Capone a d’abord réalisé treize entrevues audio avec des personnes venant de la France et de « ce qui est appelé le territoire du Québec ». Elle a par la suite retranscrit les entretiens pour en sélectionner certains passages qu’elle a regroupés selon certains thèmes. Un scénario est ainsi né de ces confidences. La réalisatrice a alors recruté différents individus qui ont accepté de rejouer les textes devant l’oeil de l’appareil cinématographique.
« La caméra change la possibilité de discours. Il y a des gens qui sont extrêmement à l’aise devant la caméra, d’autres pas. Nous parlons de sujets intimes, de sexualité, de rapport au corps, d’oppression et de violence sexuelle. Quand vient le temps de filmer avec une équipe, ça modifie profondément le rapport, le discours tenu et la parole récoltée. J’avais envie de créer un contexte intimiste où j’étais seule avec une enregistreuse pour aller chercher des parcours de vie de l’ordre du sensible », explique-t-elle à propos de sa démarche qui permettait à la fois de l’anonymat pour chacun et chacune et qui donnait également la voix à toute une communauté d’individus.
« La fabrique du consentement : regards lesbo-queer » est un projet majoritairement autoproduit. Au moment d’entamer la postproduction du long métrage, Mathilde Capone s’est retrouvée devant une évidence : si elle voulait que son film corresponde aux normes en matière de qualité d’image et de son, elle devait se tourner vers le sociofinancement.
« J’ai amassé exactement 3 789 $ ce qui a permis, avec d’autres entrées et d’autres dons, de financer l’étalonnage et de payer le mixage sonore à l’Office national du film du Canada. J’ai eu accès à l’Aide au cinéma indépendant du Canada (ACIC). Et je pourrai payer les projections et les sorties du film dans les différents formats en plus d’une petite partie de la diffusion », indique la réalisatrice.
« La fabrique du consentement : regards lesbo-queer » est projeté le samedi 30 novembre à 17h au Pavillon J.W McConnell de l’Université Concordia dans le cadre du Festival image+nation.