Sarah Jarvis revient sur l’origine du Code des filles et l’importance de sa mission
Alors que Le code des filles poursuit ses activités à Québec et commence à s’implanter à Montréal, sa membre fondatrice Sarah Jarvis continue à s’y engager afin de l’aider à accomplir sa mission. Celle qui contribue au développement de l’organisme depuis qu’elle est au secondaire garde toujours sa volonté de pousser les jeunes filles à s’épanouir dans l’industrie du numérique, où les femmes sont encore trop peu accueillies à son goût. Elle a élaboré son propos en entrevue avec Le Lien MULTIMÉDIA.
Sarah Jarvis était en secondaire 2 au Collège François-de-Laval lorsque l’ébauche de ce qui allait devenir Le code des filles a été pour la première fois mise sur la table. La responsable de cette initiative est la professeure de mathématiques Paule Delamarre, une « techno-pédagogue » auto-proclamée qui a constitué un club afin d’organiser un événement visant à promouvoir la découverte des technologies numériques chez les jeunes filles de l’établissement. « Notre premier événement était le 5 mai 2018, se souvient Sarah Jarvis. Il y avait deux ordinateurs, un iPad, trois robots, un petit panel, un défi de programmation sur Scratch… C’était vraiment petit, il ne devait y avoir que 100 personnes. »
Ce rassemblement à petite échelle a cependant produit une grande impression auprès de la jeune élève. Ambitieuse, Sarah Jarvis a souhaité reproduire l’expérience à un niveau régional, afin de diffuser l’énergie et le sentiment de découverte émis par l’événement scolaire à un plus large public. « Je voulais que tout le monde puisse profiter de ce moment que j’ai eu. On s’est assis dans le salon – le premier CA était composé de moi, mon père, ma grand-mère et mes amies ! – et on a décidé qu’on allait créer un organisme à but non lucratif et un événement grand public. » C’est ainsi qu’est officiellement né Le code des filles, en septembre 2018, le premier événement sous sa bannière se déroulant le 6 avril 2019 au centre commercial Laurier Québec.
Fortes du succès de ce rassemblement, le comité exécutif du jeune organisme s’est immédiatement attelé à planifier une seconde mouture l’année suivante, le 4 avril 2020. Néanmoins, la pandémie de COVID-19 et le confinement qui en a découlé ont frappé la province un mois avant le jour J. Sans possibilité de mener l’événement de façon conventionnelle, Sarah Jarvis et ses collègues ont du se retrousser les manches et trouver une solution pour demeurer actives. Cette contrainte a permis la création du Défi LCDF, une invitation lancée aux enseignants du primaire et du secondaire à réaliser des activités d’éducation numérique en classe, dans l’optique de remporter des lots d’outils technologiques.
« C’était au début comme une mesure d’urgence, commente la présidente du comité exécutif de l’époque, et l’organisme a complètement changé grâce à ça. On est sorti du cadre d’un seul événement à Laurier Québec et on s’est mis à offrir plusieurs services et activités. Le Défi a permis d’aller recruter encore plus de jeunes qu’avant, parce qu’on allait directement dans les écoles pour les rencontrer. On va vraiment partout maintenant : on touche les filles, les éducateurs, les entreprises… On a changé pour le mieux ! »
D’après Sarah Jarvis, Le code des filles est donc encore plus outillé aujourd’hui pour exposer les jeunes filles au numérique, dans le but qu’elles s’y intéressent et réalisent qu’une carrière dans l’industrie leur est également envisageable. Celle qui est actuellement consultante du conseil d’administration de l’organisme appuie sur l’importance de rendre le milieu accueillant pour les femmes, afin que les jeunes sentent qu’elles y ont leur place dès l’enfance. Selon Sarah Jarvis, le fait qu’elle ne se soit pas sentie la bienvenue lors d’activités d’éducation numérique pendant son enfance est la raison qui explique pourquoi elle n’a pas poursuivi une carrière dans ce domaine, malgré son intérêt.
« Quand j’étais au primaire, en cinquième année, on faisait de la robotique et je me suis retrouvé en équipe avec deux garçons. L’un d’eux m’a regardée et m’a dit "toi, ta job c’est de brancher et débrancher les fils." Ça m’a complètement enlevé le goût d’apprendre, parce qu’on me regardait comme si je n’étais pas capable de le faire. C’est aussi arrivé à une de mes amies au secondaire : un gars de son équipe lui a dit qu’elle "ne savait rien sur la robotique", alors que les deux étaient au même niveau de compétence. Aujourd’hui, elle étudie en ingénierie logicielle, elle est compétente et elle n’a pas le syndrome de l’imposteur parce qu’elle baigne dans le numérique depuis son secondaire, depuis qu’elle a participé au Code des filles. »
Par conséquent, Sarah Jarvis invite l’ensemble des établissements du secteur scolaire à éduquer les élèves au sujet du numérique et à encourager les filles à s’y intéresser, dans le but de construire la relève du milieu. « On a la capacité d’apprendre, soutient-elle, mais on a toujours peur de s’imposer, de dire "je veux prendre ma place". Je trouve que c’est vraiment important de pousser ça, d’inciter les filles à prendre leur place et de dire aux gars de ne pas hésiter à les accueillir. Quand on se sent accueilli, on a plus tendance à se développer et à apprendre de nouvelles qualités. »