[PODCAST] Simon Chioini et le confinement : un moment pour la création musicale
DJ, musicien électronique et électroacoustique, Simon Chioini nous entretient de l’impact des jours de réclusion obligée sur ses divers projets. Il parle de ses contrats présentement perdus ou reportés, et de son emploi du temps, entre autre en création musicale. Il poursuit en outre, à distance, son travail à temps partiel à programmer la prochaine saison (2020-2021) de Code d’accès, où il agit comme directeur artistique en musique contemporaine émergente. Il coordonne toujours également la technique au Nouvel ensemble moderne (NEM) en tant que responsable de production.
Les confinements actuels forcent le report, voire l’annulation, de la plupart des événements du DJ (S.Chioini ou encore DJ Voilà, ponctuellement), dont la sortie d’un maxi (EP) techno avec softcoresoft notamment. Avec son duo Musique Nouvelle, il envisageait de plus des prestations (live sets et comme DJ), accompagné de son acolyte Félix Gourd (Absurde). Les productions de concerts se voient elles aussi reportées sinon annulées, du moins toutes celles prévues jusqu’en juillet prochain. « Donc, un très gros impact sur tous les musiciens qui étaient sensés participer à cela. C’est dommage car ce sont des projets sur lesquels on travaillait depuis longtemps », regrette le jeune artiste et organisateur.
Il se console tout de même du fait de retrouver davantage de temps pour créer chez lui, et prévoir de nouvelles sorties de disques. « Je ne sais pas comment ça va se passer à long terme, mais pour l’instant ça porte fruit au niveau de la création, dit-il. D’un autre point de vue, on ne sait plus trop quoi faire avec la musique qu’on fait. Comme la musique qui devait sortir au mois de mai par exemple, en vinyle, on prévoyait des sorties qui s’en venaient, eh bien tout ça aussi est remis en jeu ; je me demande même s’il y a un public qui va encore acheter ou consommer de la nouvelle musique... J’imagine que oui, mais je sais pas encore de quelle façon, puis je pense que c’est la question qu’on se pose, en tout cas dans mon petit cercle d’amis musiciens », s’interroge-t-il. Un autre album, d’électroacoustique cette fois, devait enfin sortir bientôt sur l’étiquette espagnole Anomia, mais ce sera évidemment reporté. Cet album personnel s’intitulera « Climat avenir » et paraîtra sous son propre nom.
Le musicien semble se considérer chanceux d’avoir deux autres emplois à temps partiel, l’un d’eux chez Code d’accès et au NEM, à planifier ce qui s’en vient pour la saison automnale/hivernale prochaine. Il dit lire beaucoup, écouter des films, de la musique et confie « ne pas s’ennuyer encore ». L’impact exact de tous ces chambardements reste pourtant flou : « Je ne sais pas, je sens que je vais avoir fait beaucoup de musique chez moi et que je ne saurai pas quoi faire avec tout ça rendu en septembre... Mais pour les concerts et tout ça, c’est pas le pire. C’est sûr que j’aurais préféré pouvoir jouer devant un public, plus souvent d’ici septembre, mais ça sera juste reporté de quelque mois. Je pense pas que ce sera nécessairement néfaste de mon côté, heureusement que mon gagne-pain ce n’était pas juste ça. J’ai encore un emploi, et la situation me permet de continuer à créer chez moi sans entrave à mon travail. Pour l’instant, pour moi ça va bien. Je suis choyé. »
N’étant pas naturellement porté vers Internet ni les réseaux sociaux généralement, Simon Chioini n’est pas trop allé voir ce qu’il s’y passait présentement. « J’ai vu quelques raves en ligne, je suis quand même aller voir ce que ça donnait. Mais finalement je pense pas que ça soit la même chose qu’en personne, c’est certain. On dirait qu’en général aussi, l’idée de donner un concert en ligne ou de faire une performance en direct m’interpelle beaucoup moins, parce que pour moi ça brise pas mal l’intérêt de faire un concert. Ce qui m’intéresse davantage c’est l’idée de passer plus de temps sur la création, sur nos idées et nos projets, pour les peaufiner, afin que le contenu, après qu’il soit partagé, soit un album ou un vidéoclip, ou je sais pas quoi, bien qu’il sera meilleur, qu’il sera peut-être un peu plus profond, approfondi dans la démarche », espère-t-il. En outre, il conclut : « Le temps que ça nous donne pour la création, la réflexion, et juste le fait de ralentir un peu le rythme du travail pour pouvoir se consacrer un peu plus à notre art, c’est quand même super intéressant, et ça n’arrive pas souvent dans la vraie vie. »
L’artiste s’interroge également de la reprise des événements culturels. Y aura-t-il beaucoup (trop) d’offres en même temps ? Est-ce que le public sera au rendez-vous, craintif ? Chose certaine, il croit que cela prendra du temps avant que les choses ne redeviennent normales. Il souhaite aussi que le milieu aura trouvé des solutions pour reprendre adéquatement ses activités. Les jours qui viennent donneront l’occasion à tout le monde « de repenser à leurs divers projets, leurs façons de faire, de se réorganiser, puis de se reconcentrer sur les priorités. J’espère que ce sera le cas et que tout ça n’est pas entièrement négatif, pour tous les artistes qui vivaient de la performance », ajoute-t-il.
Bien que la réclusion ne durait que depuis environ deux semaines au moment de notre discussion avec Simon Chioini, ce dernier pense que des collaborations naîtront de cette situation, puisque c’est assez simple de s’échanger des fichiers, particulièrement en musique électronique, et de faire de la musique à plusieurs, même à distance. Par exemple, il compte réaliser le vieux projet d’un album avec Absurde pour leur étiquette Humidex.