Les réseaux de transport en commun des grandes villes canadiennes auraient avantage à mieux répondre aux habitudes de déplacement des femmes, selon une étude dirigée par l’Université de l’Alberta à laquelle ont participé Polytechnique Montréal et la firme Leading Mobility Consulting.
L’étude révèle que les femmes constituent le plus grand groupe d’usagers des transports en commun au pays, mais que l’offre de services actuelle n’est pas toujours adaptée à leurs besoins. Les Canadiennes ont notamment tendance à se déplacer en dehors des heures de pointe, à réaliser plusieurs arrêts au cours d’un même périple et à parcourir de courtes distances, souvent au service d’autrui. Or, ces habitudes de déplacement sont généralement moins bien desservies par l’offre de transport public des grandes villes canadiennes, selon Geneviève Boisjoly, professeure adjointe au Département des génies civil, géologique et des mines de Polytechnique Montréal.
« Nos réseaux de transport en commun répondent d’abord aux besoins des travailleurs et étudiants qui les empruntent aux heures de pointe vers des destinations centrales », dit-elle. « Le problème, c’est que cette politique complexifie les déplacements de plusieurs utilisatrices et amène aussi certaines d’entre elles à adopter la voiture. »
Dix-huit réseaux analysés
Les chercheuses et chercheurs ont basé leur analyse sur des résultats associés à dix-huit réseaux de transport établis dans les huit plus grandes régions métropolitaines du pays, dont ceux des villes de Montréal, Québec, Longueuil, Laval et Ottawa-Gatineau. En plus de cerner les besoins des utilisatrices des transports en commun, ils ont déterminé quelles étaient les politiques que les sociétés de transport gagneraient à adopter partout au pays.
Le groupe salue notamment les efforts de restructuration des réseaux menés par plusieurs agences de transport en commun et visant à améliorer le service hors pointe et les connexions locales, répondant ainsi aux habitudes de déplacement des femmes. Il souligne notamment la restructuration présentée par la Société de transport de Laval, qui passe d’un service desservant principalement les déplacements vers le centre-ville de Montréal aux heures de pointe à un service priorisant la fréquence locale au sein même de la ville de Laval.
Chaque réseau de transport public canadien pourrait ainsi améliorer son offre pour non seulement simplifier les déplacements des femmes, mais aussi favoriser le recours à ses services. Le groupe souligne entre autres que les ménages avec enfants sont 50 % moins susceptibles d’utiliser les transports en commun en raison des contraintes physiques des réseaux, qui complexifient les déplacements avec enfants. « En adaptant les réseaux de transport en commun aux femmes, on pourrait augmenter la proportion de familles qui adoptent ce moyen de transport », indique la professeure Boisjoly.
Avant d’aller de l’avant, le groupe de recherche recommande que chaque réseau de transport public mène sa propre enquête auprès de sa clientèle féminine afin de mesurer son utilisation ainsi que les barrières qu’elle rencontre. Le groupe suggère aussi de mettre en place des outils de collecte de données qui tiennent compte du genre des usagers, en plus d’augmenter la représentativité des femmes à tous les échelons des organisations.
« En améliorant nos connaissances sur la façon dont les femmes se déplacent dans nos villes, les agences de transport en commun seront mieux outillées pour prendre des décisions stratégiques éclairées et répartir les services de la meilleure façon possible », ajoute la professeure Boisjoly. « À long terme, tout le monde profitera d’un réseau qui répond aux besoins de sa clientèle. »
Cette [étude>https://publications.polymtl.ca/10017/] a été cofinancée par le Conseil de recherches en sciences humaines et Infrastructure Canada.