La transformation numérique se fera grâce à tout l’écosystème
La transformation numérique doit-elle être un acte d’agilité collective ? C’est la question qu’Alain Thériault, associé et coach exécutif chez ExoB2B a posé à Laurent Simon, professeur titulaire au département d’entrepreneuriat et innovation à HEC Montréal lors d’une conférence virtuelle. En tout cas, elle peut être perçue comme un mal nécessaire, comme on a pu le voir avec l’utilisation des plateformes de rencontres lors du confinement dû à la pandémie.
Pour Laurent Simon, le numérique provoque l’innovation. Il identifie trois éléments s’appliquant à la gestion. D’abord les processus qui s’avèrent un accélérateur pour le numérique. Toutefois, il faut les prendre dans le contexte, il faut faire de la gestion du changement généré par l’innovation. Il faut aussi appliquer une logistique stratégique. « Il faut apprendre ensemble le potentiel des outils, dit-il. De plus en plus, l’ouverture va faire la différence. » Cette ouverture doit aussi inclure le client, qui peut aider l’entreprise dans sa transformation numérique, mais aussi les services-conseils, comme ExoB2B. L’exercice doit se faire à 380 degrés.
Le professeur de HEC Montréal a fait le constat que les entreprises qui arrivent à innover de façon plus efficace sont celles qui ne sont pas obsédées par leur nombril, celles qui mettent au défi leurs fournisseurs et qui oeuvrent en réseaux et en partenariats. Il faut prendre la perspective de tout l’écosystème. Laurent Simon a trouvé fascinant, en temps de pandémie, la fédération d’organisations, qui se sont dit qu’elles étaient les experts et qu’il fallait que ce soit elles qui portent le changement. Cela s’est produit du côté des entreprises traditionnelles, mais aussi dans l’industrie du spectacle.
On parle de plus en plus de coopétition, alors que se développe une forme de solidarité locale. Le phénomène s’avère assez typique à Montréal et au Québec en général, grâce aux grappes industrielles. Laurent Simon donne en exemple l’industrie du jeu vidéo qui s’est développée au fil des 20 dernières années et qui a créé un écosystème dynamique, dans lequel les plus gros aident les plus petits. Il faut créer des communautés d’innovation, la force se trouvant dans la diversité, estime l’expert. Il faut expérimenter collectivement dans l’esprit de créer une solidarité. « On apprend plus vite et mieux quand on apprend ensemble », ajoute-t-il.
Pour lui, une expérience comme Le Panier Bleu relève plutôt du B2C. Par contre, si l’on regarde du côté des entreprises, du B2B, le pont ne semble pas avoir été fait. Existe-t-il un équivalent du Panier Bleu pour ce secteur ? Le 12 mai dernier a vu le jour le Regroupement des firmes de services professionnels indépendantes (RFSPI) regroupant quelque 170 firmes de services professionnels de propriété québécoise. Un des buts est de mettre en place un répertoire des expertises.
Autre exemple d’initiative innovante, InnoCentive, un marché d’innovation ouverte, permet à ses membres de lancer un défi, suivi d’une sorte de sprint lors duquel les gens peuvent proposer des solutions. Même la NASA utilise la plateforme pour divers projets, dont celui pour faire la lessive dans l’espace.
Le gouvernement a aussi un rôle à jouer dans l’innovation numérique, le Programme actions concertées pour le maintien en emploi (PACME–COVID-19) en est un bon exemple. La formation demeure clé pour l’innovation. « Quand on regarde les entreprises dans le temps long, celles qui restent en tête sont celles qui investissent en innovation, note Laurent Simon. Ce n’est jamais un mauvais pari. » Il reprend l’exemple de l’industrie du jeu vidéo. En 1997, Bernard Landry a financé l’arrivée d’Ubisoft à Montréal non pas pour créer une infrastructure, mais pour la création d’emplois. « Et même si des entreprises ont par la suite déménagé, il en reste quelque chose », note-t-il. L’innovation technologique peut aussi venir de l’intérieur, de nombreuses entreprises, comme IBM, 3M ou encore Google, misent sur l’intrapreneuriat.