Guilhem Caillard francophonise CINEMANIA
Fondé en 1995 par Maidy Teitelbaum, le festival CINEMANIA est, depuis un quart de siècle, le rendez-vous indispensable pour les Montréalais et les Montréalaises mordus de cinéma francophone. Dès le début du mois de novembre, ils et elles se rassemblent au Cinéma Impérial afin de voir sur grand écran les productions de la francophonie mondiale les plus prisées et primées du moment. Tout cela grâce au travail dévoué d’une solide équipe menée par Guilhem Caillard, directeur général du festival que Qui fait Quoi a rencontré à l’occasion du 25e anniversaire de l’événement.
C’est d’abord en tant que programmateur que Guilhem Caillard se joint à Cinemania en 2011. Puis, trois ans plus tard, alors que le festival célèbre ses 20 années d’existence, le jeune homme originaire de France est nommé directeur général. Sa véritable mission commence.
« Lorsque j’ai été appelé par Maidy Teitelbaum, c’était pour donner à Cinemania un nouvel élan tout en conservant sa vision, l’idée qu’elle avait depuis le départ du festival, c’est-à-dire un grand rassemblement autour du cinéma francophone. Ce qu’elle souhaitait au départ, c’était d’élargir la francophonie », se remémore-t-il.
Évidemment, depuis sa première année où la présidente et fondatrice a organisé la projection d’oeuvres cinématographiques en français avec sous-titres anglais pendant 5 jours consécutifs au Musée des beaux-arts, le festival a énormément évolué. Accueillant toujours les vedettes les plus prestigieuses et les plus grands cinéastes de la francophonie, l’événement atteint progressivement une maturité tandis que les associations avec les partenaires se multiplient et se solidifient.
Mais, alors que l’équipe se prépare aujourd’hui pour la 25e édition, le directeur général se retrouve devant une programmation complètement francophonisée qui délaisse un peu les tendances franco-françaises des années antérieures.
D’un côté, cela se traduit par la création du nouveau prix jeunesse francophone remis en association avec TV5 Québec/Canada et déterminé à partir d’une compétition nommée « Visages de la francophonie ». Sept films se disputeront le titre : « Camille » de Boris Lojkine, un film à propos de la guerre en Centrafrique, « Papicha » de Mounia Meddour, long métrage sélectionné pour représenter l’Algérie aux Oscars, « Sympathie pour le diable » de Guillaume Fontenay, une coproduction entre la France et le Canada, « La miséricorde de la jungle » de Joël Karekezi, coproduit par la Belgique et la France et se déroulant pendant la Deuxième guerre du Congo, « Lola vers la mer » du Belge Laurent Micheli, « Les hirondelles de Kaboul », long métrage d’animation franco-suisso-luxembourgeois et le très attendu « Atlantique » de la cinéaste franco-sénégalaise Mati Diop.
De l’autre, le festival a réussi à renforcer ses ancrages professionnels dans l’industrie devenant un moteur essentiel auprès des professionnels québécois, qu’il s’agisse des distributeurs qui se servent plus que jamais de CINEMANIA comme rampe de lancement pour leurs films. « Nous sommes passés de 15 % de la programmation qui avant était constituée de films distribués au Québec à maintenant 50 %, voire 60 % selon les années. Cela prouve que nous avons un rôle dans la chaine », indique Guilhem Caillard.
Bien sûr, la mise en marché des films représente toujours un pari pour les distributeurs, concède le directeur général. Mais lorsque CINEMANIA contribue à propulser certaines productions, cela se mesure concrètement. Il n’y a qu’à penser à l’événement spécial entourant la projection du film « Le grand bain » en 2018 qui a permis de créer un engouement quelques jours plus tard lors de sa sortie dans les salles au Québec ou encore à la présentation d’« Emma Peeters » en préouverture du festival l’an dernier qui a permis à faire parler du film avant qu’il ne prenne l’affiche.
Il y a aussi les producteurs québécois qui ont bénéficié en 2016 et 2017 de l’accueil des Rencontres de coproduction francophone pendant CINEMANIA, un marché de coproduction auquel ils ont maintenant accès et qui se déroule à intervalles dans les autres pays de la francophonie. « Nous espérons que ces rencontres reviendront à CINEMANIA d’ici quelques années. Il y a d’ailleurs une volonté politique pour que ce soit le cas. Ça a été extrêmement bénéfique pour nous parce que ça a permis à Cinemania d’éclater et de rayonner davantage auprès des producteurs », précise Guilhem Caillard.
« Une chose que nous avons bien réussi ces dernières années, c’est aussi d’impliquer les agences d’artistes, par exemple l’Agence artistique Duchesne. Que ce soit l’actrice Tanya Kontoyani qui a fait nos présentations, que ce soit lors de repas organisés pour mettre en lien nos invités européens avec des Québécois. Nathalie Duchesne m’aide beaucoup dans cette stratégie. Un festival est fait pour cela, afin que les professionnels du Québec puissent l’utiliser à leur bon escient », ajoute-t-il.