Nicolas Bernier précise sa démarche artistique basée sur la curiosité
Professeur adjoint à la faculté de musique de l’Université de Montréal, Nicolas Bernier pratique la musique électroacoustique depuis une quinzaine d’années. En plus de cette discipline, l’artiste explore plusieurs formes au fil de ses projets, dont l’installation, la performance et l’art vidéo. Même si son parcours pourrait être fractionné en trois phases (des oeuvres figuratives associées à une musique électronique, la construction et le jeu de machines pour produire cette musique et un intérêt pour l’installation), le musicien reconnaît une motivation fondamentale à son travail. « Ce qui connecte tout ce que j’ai fait c’est de toujours vouloir relier l’abstraction musicale à la matière physique », affirme-t-il en entrevue.
Lorsqu’il crée ses projets, Nicolas Bernier doit se sentir animé par une obsession. Dernièrement, il s’est intéressé plus sérieusement à la science, un domaine avec lequel il n’est pas du tout familier. « Je me mets à lire, je m’intéresse aux vieux objets, à l’histoire de la musique électronique et de la recherche du son, raconte-t-il. Parfois, c’est une idée qui me marque et qui va influencer la pensée sur un projet. »
Cette soif de savoir est également à l’origine de ses débuts avec la musique électroacoustique. « Je me suis pointé à un concert à l’Usine C. Je me suis assis. Tout à coup, les lumières se sont fermées. Il y a eu du son pendant une heure. Les lumières se sont ouvertes. Les gens ont applaudi. Moi, j’étais sur ma chaise et je m’attendais à voir quelque chose sur scène. Il n’y a rien eu de ça. Je suis sorti complètement troublé de cette expérience », relate le musicien.
Nicolas Bernier devait comprendre ce qui venait de se produire. Il s’est alors mis à effectuer de la recherche sur le sujet et de fil en aiguille, il a pris connaissance des études possibles dans ce domaine. Son chemin s’est défini par un baccalauréat et une maîtrise acquis à l’Université de Montréal ainsi que par l’obtention d’un doctorat à l’University of Huddersfield au Royaume-Uni.
L’intérêt de l’artiste pour les autres disciplines entre en parfaite continuité avec cette curiosité. Mais ultimement, le musicien ne fait aucune distinction entre les formes d’art : elles permettent toutes de transmettre une forme d’énergie. « Que ce soit un son ou une image ou une sculpture, comme artiste, c’est ce que tu fais, tu vas transmettre une énergie à des gens. »
Ayant également collaboré à des propositions au théâtre et en danse, Nicolas Bernier estime que ces expériences amènent à réfléchir sur la cohérence du mouvement dans la performance qui ramène encore une fois au lien entre le monde physique et le son dont l’association à un instrument est impossible. « Bien que la performance électroacoustique animait les précurseurs de la musique électronique comme Pierre Henry et Karlheinz Stockhausen, j’y vois encore aujourd’hui un des plus grands défis de ce type de création musicale », exprime le créateur.
Homme de pratique assumé, l’artiste avoue ne pas se considérer comme un théoricien. « Si on veut enseigner l’art dans les universités, on a besoin d’artistes, déclare-t-il. Ma recherche se passe dans la création ». Cela n’empêche pas le musicien de se laisser influencer par des ouvrages pour développer sa pratique artistique. « La réflexion se fait sur l’objet artistique lui-même », précise-t-il.
Car d’un point de vue universitaire, la musique s’aborde d’une tout autre façon, d’après Nicolas Bernier. En effet, il devient difficile d’enseigner un instrument de musique et la composition devant une classe de 300 étudiants. L’approche privilégiée est plus individuelle et demande davantage de temps. « Si tu es chanteur dans la vie, tu chantes. Tu vas pouvoir améliorer ta discipline en te pratiquant. C’est la même chose pour la composition : c’est par la pratique que le progrès se fait », explique l’enseignant.
Vers une nouvelle phase ?
À l’heure actuelle, Nicolas Bernier s’intéresse plus particulièrement à la science-fiction, un sujet qui n’avait jamais soulevé de grandes passions chez lui jusqu’à maintenant. De la littérature jusqu’aux films de séries B en passant par une toile d’Agnès Martin, peintre canado-américaine considérée comme minimaliste, l’artiste se laisse inspirer par de nombreuses références dans le but de trouver de nouvelles façons d’expérimenter le visuel.
« Je suis en train de me faire un genre de grille lumineuse qui risque d’être assez grande et que je lie à de la musique futuriste pour essayer de recréer un peu les visuels des films de science-fiction », décrit-il.