Pari assez risqué que ce troisième véritable album de DJ Champion, mis à part quelques « live ». Il s’agit cependant d’une suite logique pour Maxime Morin, qui a déjà touché la musique de film (« Matroni et moi ») et collaboré avec l’OSM. Il aborde ici une musique en partie arrangée pour un petit ensemble, mais aussi en général plus calme que ses réalisations précédentes.
« Déroutant par son extrême polarité », tel qu’on peut le lire sur le site de l’étiquette Bonsound, l’album °1 (se dit Degré un) comporte 3 inspirations assez distinctes : une première et importante, du côté de la musique sans boîte à rythme, orchestrale et cinématographique. Pour ces pièces atmosphériques et vibrantes, Champion s’accompagne sur cet opus (!) d’un orchestre relativement modeste, mais efficace, le quatuor à cordes Mommies on the Run, ainsi que du tromboniste et arrangeur Jean-Nicolas Trottier. À cela s’ajoute un piano, aux moments opportuns, comme pour le titre Virginie, qui peut rappeler la musique de Yann Tiersen. Purement instrumentales parfois, comme A Dog and a Goat (poignante, avec des boucles très Philip Glass), certaines pièces intègrent également le désormais fidèle chanteur Pilou (sur Dat Train, et aussi Half a Mile) ou encore la rappeuse de Random Recipe Fab (sur Every New Now). L’Envol du ciel, quant à elle, tente quelques sonorités bruitistes et des assonances, un peu comme à l’époque romantique autour du début du XXe siècle.
Une deuxième section, certes un peu frugale, rejoindra sans doute l’auditoire habituel de Champion, avec 3 titres plus pop et dansants, comme le premier extrait, No Love Enough entonné par Pilou (Pierre-Philippe Côté). Alors que Montecristo penche du côté latin, avec des nappes dubby de guitares qui se répondent en écho, typiques du son Champion, la pièce de résistance, Grand Prix, lorgne elle du côté balkan. Avec d’hypnotiques notes de trombone, on garde pendant 9 minutes une savoureuse tension, qui n’est pas sans rappeler des titres de l’album précédent, Résistance, de même que des artistes de house minimal, comme Claude Von Stroke, Onur Özer ou Pantha du prince.
La dernière part de ce "premier degré" offre quelques rengaines blues (les 4 titres numérotés en degré, °356, °357, °358, °359), où Maxime Morin semble n’avoir rien à perdre ni à prouver, comme à fleur de peau et viscéral. En finale, Nothin’ Nothin’ rejoint même un certain ‘low-fi’ ravageur (voire autodestructeur).
En spectacle le 6 juillet 2013 au Festival international de jazz de Montréal à la salle Wilfrid-Pelletier de la Place des arts, avec les G-Strings ainsi que l’orchestre de chambre I Musici.